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Parler avec les mains
Sur deux dessins de Jean-Luc Verna.
Posted in Autour des images, Non classé 20 min read
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in Catalogue de l’exposition À mains nues. – Parcours de la collection du MAC VAL, Textes de Marie Darrieussecq, Romina De Novellis, Alexia Fabre, Agnès Gayraud, Caroline Honorien, Philippe Liotard, Claire Moulène, Mathieu Potte-Bonneville, Fabienne Radi, Anne-Lou Vicente, Marion Zilio. Ed. Vitry-sur-Seine – MAC VAL musée d’art contemporain du Val-de-Marne – 2022.

Ce sont deux mains – ou deux fois une main, la même ? Disons, provisoirement, qu’il s’agit de deux mains, deux des mains de Jean-Luc Verna.

Paume tournée vers le sol, doigts étendus et ongles faits, la première d’entre elles prend appui sur son pouce dressé verticalement au point que l’éminence qui prolonge ce dernier à sa base, côté paume, s’arrondissant vers l’arrière dessine par sa courbure le bombé d’un talon. Du fait de ce rebroussement, une double indécision trouble alors le regard : celui-ci ne sait plus s’il contemple une main ou un pied, hésitation à laquelle contribue un peu plus haut sur le dessin la forme élancée de l’attache évoquant la cheville plutôt que le poignet ; mais qu’il consente un instant à y voir un pied nu, et l’œil vacille bientôt au bord d’une autre hypothèse, saisi cette fois par la tentation d’y reconnaître une chaussure, stiletto dont ce qui semblait tout à l’heure un pouce forme désormais le talon aiguille. Ainsi le dessin ouvre-t-il une bifurcation discrète, à l’instar de ces figures ambigües qu’analysait Ludwig Wittgenstein où se laissent voir tantôt un lapin et tantôt un canard, mais jamais l’un et l’autre ensemble : ce sont comme deux destins possibles pour l’image, l’un laissant la main parcourir à rebrousse-temps la ligne de l’évolution, défaire la bipédie, livrer le corps à ses pulsions quadrumanes, main devenue plus nue que nue en somme de désenfouir le souvenir de sa propre animalité ; l’autre reconduisant au contraire vers l’ornement, la parure, la sophistication et l’artificialité des talons aiguilles, accessoires faisant à ce fragment de corps comme une seconde nature, parure incorporée dont la séduction décorative s’étend aux tatouages que suggère ici le lavis d’encre zébré à même la peau. 

Rien n’indique cependant qu’à jouer à la fois le trouble dans le genre et dans la spéciation, à refuser ainsi de choisir entre le grand singe et la femme fatale, la main ici posée s’en trouverait écartelée ou prise dans l’étau d’un dilemme tragique – peut-être le cercle qui l’entoure la protège-t-il, lacis fermé d’une nuée de ces étoiles issues d’une baguette de sorcier ou de fée dont on sait qu’elles sont l’un des motifs privilégiés de l’artiste. Peut-être ces connotations magiques permettent-elle de tenir ensemble les lignes adverses, laissant le corps remonter d’autant mieux la pente de ses métamorphoses qu’il intègre les signes culturels, boit l’encre déposée sur sa peau et laisse pousser à ses extrémités ses propres talons hauts.

L’escarpin d’Afrique, 2001
Transfert sur papier, crayon, fard, autocollants, laque, 32 x 49 cm
Collection MAC VAL – Musée d’art contemporain du Val-de-Marne
© Adagp, Paris 2022

La deuxième des mains se tient elle aussi au centre d’un cercle : plus précisément, un disque ocre coiffé en sa partie supérieure d’une façon de mantille piquée de toupets de plumes noires, auréole ou diadème où l’on reconnaît bientôt diverses pièces de tissu tirebouchonnées en arc, croissant de fringues du genre de ceux qui s’évasent à même les parquets aux pieds d’amants trop pressés de se dévêtir mutuellement, sous-vêtements ligotés dans des jambières en boule, héraldique de hasard où les insignes par quoi chacun se présentait à l’autre roulent au sol destitués, emmêlés par une même fièvre. Ainsi entouré, le disque apparaît aussi bien couronné que dénudé : et si la figure ambiguë esquissée par Jean-Luc Verna nouait tout à l’heure l’animalité à la parure, elle vient ici de l’autre main tresser l’érotisme au sacré. Car du geste esquissé par cette main au fusain, on aimerait d’abord dire qu’il est sans ambiguïté : si trois des doigts élégamment tendus paraissent presser la surface de l’image, l’annulaire et le majeur disparaissent au contraire dans ses profondeurs, suggérant au droit de leur effacement une fente en trompe-l’oeil et prodiguant à ce corps absent une caresse profonde, absorbée en tous les sens du terme, i.e. concentrée et avalée par le point de fuite. C’est un dessin cru, donc, comme on le dit de ce qui est sexuellement explicite mais aussi de ce qui n’a pas encore subi le genre de cuisson que la culture impose : le lacis de significations que celle-ci pose sur nos corps, en repli comme effarouché sur les bords de l’image, rend la main à un contact sans phrase où il s’agit de toucher plutôt que de dire, de s’enfoncer plutôt que de montrer. 

Notons à ce propos que cette main partage avec la précédente le choix de reléguer l’index à jouer les utilités : le doigt préposé à la monstration, celui qui tire sa désignation latine de l’acte même de désigner, le doigt pointé chez Raphaël vers le ciel de Platon ou la terre d’Aristote, chez tant d’autres vers l’horizon, vers l’enfant à naître ou la tempête à venir, vers le Christ ou vers sa plaie au flanc (il y aurait à faire une histoire de l’index en peinture, et cette histoire se confondrait largement avec l’index de la peinture elle-même), l’index donc vient ici littéralement en appui, en levier, subalterne : le premier rôle est tenu par les doigts qu’on ne voit pas, phalanges affairées à fouiller, presser, occuper et ouvrir la surface picturale. Reste que, si Alfred Hitchcock pouvait juger fort difficile de se défaire d’un corps, il n’est pas si aisé non plus de se débarrasser des signes ; en inversant rigoureusement l’ordre et le rôle des doigts, en confiant à ceux qui se montrent le rôle d’entourer ceux qui se cachent, en se donnant en somme pour un signe négatif (comme on parle de « mains négatives » à propos de ces silhouettes en réserve, auréolées de pigments soufflés à leur pourtour dans l’art pariétal) le dessin ne peut manquer de voir revenir à lui la mémoire d’autres mains, d’autres signes : ainsi du fléchissement des doigts intermédiaires, qui prenait dans l’iconographie chrétienne des premiers siècles ou la tradition orthodoxe des significations précises, main bénisseuse traçant des Ï, des C, des X jusqu’à écrire dans l’air le nom même du Christ. 

Dégager, en repoussant à sa périphérie les oripeaux qui blasonnent nos existences costumées, l’espace nu d’un mouvement dont toute parole aurait reflué pour laisser place aux actes ; mais convoquer, dans ce mouvement même et l’allure d’icône qu’on lui donne, le spectre d’une histoire, d’une rhétorique manuelle et d’une mystique de l’expression dont le cercle d’étoffes, entre couronne et voile, rehausse la dimension souveraine ; hésiter, en suspens, entre les profondeurs du corps et la transcendance de la signification : rarement oeuvre aura ramassé avec autant de concision, à la jointure où action et symbole se contestent l’un l’autre, ce que c’est au juste qu’un geste. En un mot, un signe de la main.

Perfectos, 2009
Transfert sur bois rehaussé de pierres noires, cuir, cheveux synthétiques, guirlande électrique, acier, silicone, couteau, os, résine, métal, strass. 123 x 130 x 30 cm.
Collection MAC VAL – Musée d’art contemporain du Val-de-Marne
© Adagp, Paris 2022

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(On l’aura compris : le mince enjeu de ce texte est de se demander si, et à quelles conditions, une main peut jamais être nue. Voyons voir).

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Dans le recueil d’articles et d’interventions de Jacques Derrida intitulé Psyché Inventions de l’autre figure une conférence prononcée à Chicago en 1985 sous le titre La Main de Heidegger. Inscrit dans une série de textes où Derrida tente d’éclairer la signification du concept de Geschlecht (terme dont il indique que « selon les contextes qui viennent le déterminer, ce mot peut se laisser traduire par sexe, race, espèce, genre, souche, famille, génération ou généalogie, communauté »), cette conférence vise à identifier le statut et les impensés du « nous » dont la pensée de l’auteur d’Etre et temps entend se recommander, le point d’ancrage, d’appartenance et de rassemblement depuis lequel elle se déploie. Tout se passe comme si dans ces pages Derrida demandait à Heidegger : vous ne cessez, philosophant, de vous revendiquer d’un « nous », mais « nous » qui, au juste ? A cette question (dont, on l’imagine, toute inquiétude politique n’est pas absente), l’une des réponses longuement analysée pourrait être ainsi résumée : nous, qui avons des mains. C’est en tout cas ainsi que Derrida lit le bref passage d’un séminaire de 1951-52 où Heidegger énonce :

« La main offre et reçoit, et non seulement des choses car elle-même s’offre et se reçoit dans l’autre. La main garde, la main porte. La main trace des signes, elle montre, probablement parce que l’homme est un monstre (Zeichen) ».

De cette caractérisation du propre de l’homme à travers sa main nue, sa main comme telle, Derrida entend dégager « si l’on peut dire, la forme et le passage de la main : la main de Heidegger », nommant ainsi à la fois l’idiosyncrasie d’un philosophe qui aimait à poser sur les photographies canne ou stylo en main, et le système de délimitations implicites que cette identification entre main et pensée humaine emporte avec elle. Il s’agit, en d’autres termes, de déceler les présupposés silencieux qui soutiennent l’identification de l’homme à cette série de gestes cardinaux où nous aimons nous reconnaître (offrir, recevoir, garder, porter, tracer des signes), et l’attribution de ces gestes eux-mêmes à cette extrémité où notre être trouverait à se rassembler. Or justement : si je bifurque ici vers ce texte, c’est qu’il me paraît marquer plusieurs points de vigilance utiles à l’heure où une part de la pensée et de la sensibilité contemporaines est, pourrait-on dire, prise par la main, autrement dit tentée (pour des raisons écologiques, politiques, culturelles qu’il serait trop long d’analyser) de préférer les prises directes que la main assure sur le monde aux médiations techniques qui nous en éloignent, ou le contact direct qu’elle offre avec les choses aux séductions de la marchandise, ou la sincérité émouvante du tactile aux arcanes du symbolique et aux faux-semblants du langage. 

Pointons, au fil du commentaire que Derrida propose, deux de ces alertes discrètes. Derrida invite d’abord à prêter attention à la manière dont cette identification de la pensée à la main (« C’est en tout cas, le penser, un travail manuel » écrit Heidegger) s’enracine non dans le rappel de l’infinie polyvalence dont nos mains sont capables mais, à l’exemple du menuisier, dans la description d’un Handwerk conçu comme métier noble par opposition à l’activité orientée par le négoce, le commerce et le goût du profit. Sous cet éloge du travail manuel, perce une hiérarchisation implicite et précise : d’un côté « le travail de la main guidé par l’essence de l’habitat humain, par le bois de la hutte plutôt que par le métal ou le verre des vitres » ; de l’autre, « l’activité qui coupe la main de l’essentiel, l’activité utile, l’utilitarisme guidé par le capital ». Si cette critique du machinisme trouve des résonances contemporaines, on ne peut s’empêcher de frémir à voir s’y dessiner, sous l’exaltation de la main nue, l’opposition entre main pure et main crochue. Premier point de vigilance : faire fonds sur l’intimité que la main entretient avec les choses mêmes, c’est ici côtoyer « une réaction archaïsante vers l’artisanat rustique », doublée d’une dénonciation du négoce et du capital qui, s’agissant de Heidegger dont on sait les accointances qu’il eut avec le national-socialisme, prête certes à s’alarmer.

D’un côté donc, la main suffit, et toute médiation qui s’interposerait entre elle et les choses en pervertirait la vocation première ; mais si elle n’est ainsi rien qu’une main, c’est aussi qu’elle est selon Heidegger plus qu’une main, irréductible à un simple organe corporel de préhension et transcendant sa propre nature biologique : ni serre, ni patte, ni griffe. Avec une attention qui nous est devenue familière mais dont bien peu de philosophes témoignaient en 1985, Derrida souligne combien ce sont les animaux qui font ici les frais de cette valeur d’exception conférée à la main humaine, autrement dit combien la délimitation du propre de l’homme repose chez Heidegger sur un pseudo-savoir zoologique qui rejette de l’autre côté du sens toute l’animalité, sous la figure du singe. Heidegger écrit : “Le singe, par exemple, possède des organes de préhension mais il ne possède pas de main” – et Derrida commente : “Ce que Heidegger dit du singe privé de main (…) n’est pas seulement dogmatique dans la forme parce que Heidegger n’en sait rien et n’en veut rien savoir à ce point. C’est grave parce que cela trace un système de limites dans lesquelles tout ce qu’il dit de la main de l’homme prend sens et valeur”. 

Ainsi, c’est sous la condition d’un double éloignement qu’à la question “qui parle ?”, Heidegger peut répondre : “nous, qui avons des mains”. Il lui faut pour cela tenir à distance, de part et d’autre, la technique et l’animalité, l’utilitarisme et la biologie, le machinique et le simiesque. Dans ce cercle étroit seulement survient pour lui le geste qui montre, le geste comme monstration où le corps se transcende dans l’offrande d’une parole mais où la parole se tient dans l’intimité du corps, tracé d’un signe où les doigts se referment sur le langage qui les ouvre en retour à la possibilité du sens, jusqu’à nous définir de part en part — “la main trace des signes, elle montre, probablement parce que l’homme est un monstre”. Plutôt que d’écrire “l’homme est un signe”, Derrida préfère ici pour traduire Zeichen recourir au mot de “monstre” : rappeler  ainsi la parenté étymologique entre la monstruosité et le signe qui montre a, c’est visible, valeur d’avertissement. Il se pourrait que cette manière-là de joindre le geste à la parole, en repoussant hors du “nous” les mains crochues et dévoyées du commerce apatride et les pattes agiles, préhensiles du singe, entretienne sur ses bords de monstrueuses complicités. 

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(Un peu plus loin, Derrida note : “D’autre part, on the other hand, rien n’est jamais dit de la caresse ou du désir. Fait-on l’amour, l’homme fait-il l’amour avec la main ou avec les mains ? Et quoi de la différence sexuelle à cet égard ?”)

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Le 17 novembre 2019, le philosophe Paul B. Preciado donna lui aussi une conférence à l’invitation de l’Ecole de la cause freudienne, prise de parole qu’il publia ensuite sous le titre Je suis un monstre qui vous parle et dont la force d’interpellation ne passa pas inaperçue. Le scandale vint de l’adresse autant que du propos : la mise en question d’une psychanalyse arc-boutée sur la différence sexuelle au mépris des transformations et des traversées historiques qui en ébranlent l’ordre, la dénonciation de sa solidarité avec les violences perpétrées par ce que l’auteur nomme le régime patriarcal et colonial, l’ensemble de ces points en bref ne se déployaient pas seulement au travers d’un discours précis et rigoureux, mais se soutenaient aussi de la présence même de Paul B. Preciado, propos lancés et adressés depuis son allure d’homme trans, réarmés par l’exhibition de son corps non-binaire modifié par la prise de testostérone. L’émoi suscité par cette intervention vint sans doute, non moins que du fond, de la manière dont y faisaient cercle l’enracinement des arguments dans l’irruption d’un corps et l’exhibition d’un corps valant argument, performance dont Paul B. Preciado assumait au passage avec ironie la dimension spectaculaire, aux limites de la performance : “je ne pourrais pas vous dire les banalités qui vont suivre si (…) ma position de trans n’avait été déjà affirmée de manière incontestable dans tous les grands spectacles du monde civilisé”. 

Relisant ce texte avec en tête les pages et les images dont j’ai tenté plus haut de dire quelque chose, je suis saisi de la manière dont Paul B. Preciado y opère une subversion rigoureuse, témoignant d’un renversement qui de mille manières traverse la pensée, l’art et la sensibilité d’aujourd’hui. Cette subversion emprunte d’abord les traits de la plus grande fidélité, comme le fusain de Jean-Luc Verna mimerait une esquisse de Raphaël : intituler son texte Je suis un monstre qui vous parle, c’est très exactement rejouer l’identification heideggerienne de l’homme à un zeichen, à un signe dont la valeur démonstrative puise à ce qu’il tient ensemble le surgissement du corps et celui du langage. Au coeur de son dispositif, c’est bien le propre de l’homme que Preciado entend rejouer, ou vers lequel il fait un geste. La différence tient à ce que, cette fois, le rassemblement du corps parlant à partir de ce geste n’implique plus de tracer autour de lui un cercle au-delà duquel se trouveraient relégués ensemble le sexe, la technique et la zoologie : cette fois, il faudra compter avec l’entre-deux du désir, avec la technique et avec l’animal ; et parce qu’il s’agit non de fixer un propre mais d’accueillir une transition (“le monstre est celui qui vit en transition”, écrit Preciado), s’il y a cercle, celui-ci vient conjoindre plutôt que séparer. Conjoindre, d’une main, la nudité du corps à sa transformation méthodique et technologique : citant l’artiste Del LaGrace Volcano, Preciado définit l’être trans comme un être “intersexuel by design”, faisant de la testostérone “une alliée dans la tâche de s’inventer un ailleurs”, ou voyant dans la transition de genre un “agencement machinique avec l’hormone”. Conjoindre, de l’autre main, les forces d’un sujet s’efforçant d’échapper à sa cage aux puissances et aux ruses de l’animalité. Sur ce point, j’avoue avoir été sidéré de voir revenir, dans ce texte et au lieu même d’où elle avait été chassée soixante-dix ans plus tôt par Heidegger, la silhouette sombre et ramassée du grand singe, paumes ouvertes : figure dont Derrida soutenait que son exclusion révélait dans le texte heideggerien un impensé fondamental ; et figure à laquelle Preciado s’identifie crânement au seuil de son discours, empruntant au Kafka de Rapport pour une académie le personnage du singe Pierre le Rouge, “singe qui après avoir appris le langage des humains se présente face à une académie des plus hautes autorités scientifiques pour leur expliquer ce que l’évolution humaine a représenté pour lui”. (ici, sous le devenir-singe de Preciado, c’est comme si un autre texte de Derrida affleurait, comme s’ils enroulaient l’un dans l’autre leurs titres : Je suis un monstre qui vous parleL’Animal que donc je suis).

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Retourner le cercle, y faire tourbillonner le jeu d’une transition subversive ; convoquer en son sein l’agencement machinique et le singe Pierre le Rouge ; puiser dans leurs figures mêlées la force de nouer autrement le corps au langage et l’ontologie à la politique, comme si détournant la formule d’Eluard dont s’empara un temps le mouvement altermondialiste il s’agissait cette fois de montrer, d’annoncer et de promettre qu’un autre monstre est possible

Tout cela, Preciado l’énonce simplement, et sa formule nue et si belle rejoint d’un bond les oeuvres de Jean-Luc Verna que nous n’avons, au vrai, jamais quittées des yeux :“La liberté est un tunnel qui se creuse avec les mains”.


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